Information du : 05/01/2022
Cycle Répertoire Ida Lupino
Le second cycle de la saison répertoire 2021/2022 sera consacré à la grande Ida Lupino et débutera en janvier dans 25 salles du réseau. Quatre films pour découvrir l'oeuvre d'une pionnière du cinéma indépendant américain et troisième grande réalisatrice, après Dorothy Arzner et Loïs Weber, à réussir à faire sa place dans le cinéma hollywoodien.
Ida Lupino, née en Angleterre en 1918, est issue d’une grande dynastie d’acteurs de théâtre dont les racines remontent à la Renaissance italienne. L’histoire raconte qu’elle écrit une pièce de théâtre à sept ans, évènement pas si improbable pour cette jeune fille baignant dans les arts dès sa plus tendre enfance, son père étant compositeur et sa mère une vedette du music-hall. Elle entre à l’Académie Royale d’Art Dramatique à treize ans, et un an plus tard part déjà en tournée dans toute l’Angleterre. Elle débute sa carrière au cinéma en 1932 - elle a alors dix-huit ans - dans un premier rôle que lui offre Allan Dwan. Après quelques films tournés en Angleterre, elle gagne Hollywood en 1934 et devient en 1940 une star de la Warner. Elle tourne dans une quarantaine de films, pour Hathaway, Negulesco, Curtiz et son mentor Raoul Walsh. Son contrat avec la Warner arrivé à terme, Lupino monte avec son mari, le romancier Collier Young, une maison de production, The Filmakers. Elle passe à la réalisation en 1949 avec Not Wanted, premier film produit par ce studio indépendant, remplaçant au pied levé le réalisateur prévu, affaibli par une crise cardiaque. C’est le début d’une seconde carrière durant laquelle elle réalise six films magnifiques en l’espace de quatre ans. Lorsque le studio fait faillite, elle poursuit sa carrière d’actrice mais continue à réaliser pour la télévision. Elle réalisera en 1966 un dernier long métrage pour le cinéma.
AVANT DE T'AIMER (NOT WANTED - 1949)
Une jeune fille, Sally Kalton (Sally Forrest), vole un bébé. Arrêtée, elle refuse d’expliquer les raisons de cet acte désespéré. Dans la cellule où elle attend sa comparution devant le juge, elle évoque le passé qui l’a amenée là?: son aventure avec Steve Ryan (Leo Penn), le beau pianiste de night-club, sa relation sincère avec Drew Baxter (Keefe Brasselle), un brave garçon mutilé de guerre, sa grossesse non-désirée…
Not Wanted est le premier film réalisé par l’actrice Ida Lupino, dont la présence derrière la caméra tient en partie à un concours de circonstances. Elle fonde en 1949 Emerald Productions (qui deviendra The Filmakers) avec son époux Collier Young. Le premier film de ce studio indépendant - dont l’ambition est de réaliser des films à petits budgets traitant de sujets invisibles sur les écrans américains - est écrit par Lupino et Paul Jarrico et doit être réalisé par Elmer Clifton. Ce dernier a débuté comme acteur en 1912, puis est passé à la réalisation en 1919, enchaînant un nombre conséquent de films plus obscurs les uns que les autres. Trois jours après le premier coup de manivelle, Clifton subit une grave attaque cardiaque (il décèdera quelques mois plus tard) et Lupino décide de prendre sa relève, la production ne pouvant se permettre d’engager un autre réalisateur. Lupino explique que Clifton, malgré sa faiblesse, est resté près d’elle sur le plateau et qu’elle n’a pas manqué de lui demander conseil (Clifton reste seul crédité au générique). De même, le monteur William Ziegler (celui de La Corde d’Hitchcock) accepte de venir sur le plateau, chose très peu coutumière dans le système des studios, pour vérifier de visu si une idée de mise en scène de Lupino peut être effectivement utilisable par la suite.
Si Lupino est entourée, le film est si personnel, la mise en scène si étonnante, qu’on pressent que c’est par fausse modestie que la cinéaste parle des deux hommes comme de proches collaborateurs. Certainement ont-ils apporté de leur technique, de leur professionnalisme, mais on trouve d’évidence dans ce film les constantes de l’œuvre à venir de Lupino cinéaste, et Not Wanted est indéniablement marqué par son style et sa sensibilité artistique. Magnifiquement photographié (le film a parfois des allures expressionnistes), doté d’une direction d’acteurs sans faille, Not Wanted frappe par la maturité de l’apprentie cinéaste. On imagine que sa longue carrière d’actrice, entamée alors qu’elle n’avait que dix-sept ans, a été l’occasion pour elle d’observer le travail de grands cinéastes et que cette longue pratique des plateaux, ou encore son amitié avec Raoul Walsh, lui ont été bien plus profitables que n’importe quelle école de cinéma. Mais le film est si singulier qu’il est tout aussi évident que l’on se trouve en présence d’une réalisatrice née.
OUTRAGE (1950)
Anne Walton (Mala Powers), qui va se marier, est victime d’un viol la veille de l’évènement. Elle essaye de reprendre sa vie, mais ne supportant pas les regards de son entourage finit par monter dans un car et prendre la fuite. Elle erre dans la nuit, se blesse, continue à marcher dans la campagne avant de tomber d’épuisement...
Lupino évoque avec Outrage de manière brillante et profonde les blessures inguérissables provoquées par un viol. Anne ne peut supporter les réactions de son entourage, quelle qu'en soit la nature. Elle désire reprendre sa vie, mais elle ne voit plus dans les regards de ses proches que de la compassion, de la curiosité malsaine, voire du dégoût. Elle n’a plus l’impression d’être Anna à leurs yeux, mais d’être une femme violée, n’existant plus qu’à travers le drame qu’elle a vécu. Pour redevenir Anne, elle doit devenir une étrangère, une errante, s’arracher au monde qu’elle connaît pour essayer de recommencer une nouvelle vie ailleurs, au milieu d’inconnus dont les regards seraient vierges de ce drame. Mai le viol n’existe pas que dans les yeux de son entourage, il est en elle et conditionne sa vision des autres, du monde. C’est ce qu’elle doit comprendre pour guérir.
Outrage est le récit de cette lente guérison et Anne est un personnage central du cinéma de Lupino qui, passée réalisatrice, n’a cessé de mettre en scène des êtres blessés par la vie qui cherchent comment panser leurs blessures. Cette blessure, le viol, est un moment de cinéma magistral : Lupino met en place une série de détails qui poussent le criminel à passer à l’acte. On ne dirait pas qu’il a au départ de telles intentions, mais c’est l’espace, la façon dont la ville est mise en scène (passant d’une vision réaliste à un quasi expressionnisme au cours de la séquence) qui semble faire que le viol ait lieu ; comme si c’était la ville toute entière, la société, qui contenait le crime en son sein. Le film ne s’attache d’ailleurs pas à trouver le coupable, à le punir, à se venger de lui, ce à quoi un film hollywoodien classique se serait attaché à faire.
Outrage est un film éblouissant de maîtrise. Pour sa troisième réalisation, Lupino atteint la sérénité des grands maîtres, fait preuve d’une maturité tout bonnement sidérante. Le film, une commande de Howard Hughes, coûte 250 000 dollars. Son sujet, bien trop en avance sur les mœurs américaines, déstabilise un public peu habitué à voir des films de cette trempe. L’échec commercial est patent, d’autant que le contrat avec Hughes entraîne un partage des recettes. La situation financière de The Filmakers, le studio indépendant fondé par Lupino, devient de plus en plus délicate, ce qui n’empêche pas la réalisatrice et sa société de production de garder le cap et de continuer à tourner et à produire des œuvres à l'écart des modes hollywoodiennes.
BIGAMIE (THE BIGAMIST - 1953)
Harry (Edmond O’Brien ) et Eve (Joan Fontaine) vivent à San Francisco. Mariés depuis huit ans, leur couple se délite : Eve ne peut avoir d’enfants et, pour essayer de compenser ce manque, se consacre entièrement à sa vie professionnelle. Harry, toujours amoureux, se sent délaissé. A Los Angeles, où il passe la moitié de son temps pour affaires, il fait la connaissance de Phyllis (Ida Lupino). Ils deviennent amis, puis amants. Lorsque Eve accepte finalement de lancer une procédure d’adoption, Harry décide de rompre avec Phyllis. Mais celle-ci vient de tomber enceinte et Harry ne peut pas l’abandonner à son sort...
The Bigamist raconte comment un homme marié tombe amoureux d’une autre femme et l’épouse lorsqu’il apprend qu’elle est enceinte, tombant dès lors sous le coup de la loi. La bigamie, sujet très peu traité au cinéma, n’est pourtant pas le coeur du film. Ce qui intéresse avant tout Lupino, c’est de parler d’êtres prisonniers d’une vie qu’ils n’envisageaient pas d’avoir. Harry et Eve voient leur couple se disloquer au fil des années. Ce n’est pas par manque de sentiments - on sent qu’ils sont toujours profondément amoureux l’un de l’autre - mais parce que les aléas de la vie font qu’ils ne peuvent former un couple comme un autre. C’est le récit d’une histoire d’amour survenue trop tard et qui vient mettre en péril une autre histoire d’amour, certes malmenée par les aléas de la vie, mais toujours vivace. Harry n’a rien d’un séducteur, et son histoire d’amour avec Phyllis naît d’abord de sa maladresse à aborder cette fille. Ils deviennent amis car ce sont deux âmes solitaires, perdues dans San Francisco, et leur histoire d’amour advient tout naturellement, sans éclats.
Dans un mélodrame classique, Harry aurait été dévoré d’amour pour Phyllis tout en souffrant d’une femme acariâtre et possessive, trame également éprouvée du film noir. Lupino joue d’ailleurs brillamment sur cette imagerie du film noir. The Bigamist démarre dans le bureau de Mr. Johnson, employé d’une agence d’adoption qui annonce aux Graham que leur dossier est accepté mais qu’il doit mener une enquête sur les deux époux. Le film a alors tous les atours du film noir : un secret à découvrir, une course contre la montre entre un enquêteur et un suspect qui se sait traqué, le tout porté par une musique et une mise en scène jouant sur le suspense et la tension. Cette première partie court jusqu’à ce que Johnson découvre le deuxième foyer d’Harry. Il pénètre dans la maison et confond le criminel. Mais l’habituel coup de feu qui serait survenu dans un polar est remplacé par le cri d’un enfant. Ce cri stoppe la musique, casse le rythme, rompt avec l’imagerie du film noir. Le film change radicalement de registre avec la confession d’Harry qui remonte le temps, raconte le délitement de son couple, sa rencontre avec Phyllis et les évènements qui l’ont amené à avoir cette double vie. La musique reprend, sur un mode mélancolique, à l’image du film qui devient terriblement poignant...
LE VOYAGE DE LA PEUR (THE HITCH-HIKER - 1953)
Roy Collins (Edmond O’Brien) et Gill Bowen (Frank Lovejoy) prennent la route pour une escapade à deux, cachant à leurs épouses respectives qu’ils s’en vont en virée du côté du Mexique. Ils prennent sur leur route un auto-stoppeur, Emmet Myers (William Talman), qui se révèle être un dangereux criminel en fuite recherché par la police de plusieurs Etats pour une série de meurtres commis contre des automobilistes. Le fuyard prend les deux hommes en otage et les oblige à le conduire jusqu’à la frontière mexicaine.
Ce film, tourné la même année que The Bigamist, tranche avec les précédentes réalisations de Lupino. D’une part car il ne prend pas comme sujet principal le parcours d’une femme meurtrie mais se consacre à un trio masculin, d’autre part car Lupino s’essaye à un genre très codé et, ce faisant, modifie son approche de la mise en scène. Lupino et Collier Young partent d’un fait divers sanglant qui vient de se dérouler en Californie : un homme a assassiné une famille (dont trois enfants) avant de prendre un couple en otage, forçant celui-ci à faire route jusqu’au Mexique où il espère échapper à la police. Le film est un exercice de style brillant, Lupino manifestant un réel plaisir à se confronter à un genre très codé et à travailler sur un tout nouveau style pour évoluer dans son métier.
Ida Lupino a démarré sa carrière de réalisatrice par hasard, et l’a poursuivie à la fois en tirant moult enseignements des cinéastes qu’elle a côtoyés sur les plateaux et en suivant son instinct et ses propres aspirations artistiques. Elle souhaite certainement à ce moment de sa carrière tenter une autre approche de la mise en scène, en l’élaborant et en la pensant dès avant le tournage. Le film à suspense est certainement le meilleur moyen pour elle de s’y essayer, le comique n’étant pas vraiment son fort et le mélodrame - genre qui demande aussi une écriture cinématographique extrêmement précise - ayant toujours été un genre qu’elle souhaite aborder de biais. La rupture avec ses autres films n’est pas non plus totalement franche et l'on retrouve dans The Hitch-Hiker cette linéarité du récit propre à la cinéaste, ainsi qu’une galerie de personnages perdus, désorientés, qui ne savent pas comment faire face au drame qui les accable.
Le film fourmille d’idées, la plus étonnante restant cette figure de criminel qu’une paralysie faciale empêche de clore sa paupière droite : un handicap qui devient une source de suspense, les prisonniers ne sachant jamais si le tueur dort ou non. Autre point fort : des acteurs impeccables, notamment William Talman qui incarne un psychopathe d’anthologie. L’acteur raconte même que peu après la sortie du film, un homme l’accoste dans la rue alors qu’au volant de sa décapotable il attend que le feu passe au vert, lui demande s’il est bien l’auto-stoppeur et, Talman acquiescant, le frappe au visage avant de repartir !
CYCLE IDA LUPINO
JANVIER - AVRIL 2022
Dans 25 salles du réseau dans le cadre de la saison répertoire Cinéphare 2021/2022
Avant de t'aimer
- Gourin, Le Jeanne d’Arc
semaine du 5 janvier
Carhaix, Le Grand Bleu
8 janvier
Questembert, L’Iris
9 et 11 janvier
Moëlan sur Mer, Le Kerfany
11 janvier
Saint Malo, Le Vauban
12 janvier
Guéméné sur Scorff, Ciné Roch
13 janvier
Huelgoat, Arthus Ciné
19 et 22 janvier
Saint Brieuc, Le Club 6
avec Les Fondus déchaînés
21 janvier
Quimperlé, La Bobine
le 25 janvier
Plougonvelin, Le Dauphin
4 février
Callac, Cinéma Argoat
06 mars
Etel, Cinéma La Rivière
à dater
Belle île, Le Rex
à dater
Douarnenez, Le Club
à dater
Groix, Cinéma des Familles
à dater
Loudéac, Le Quai des images
à dater
Morlaix, La Salamandre
à dater
Penmarc’h, L’Eckmühl
à dater
Plestin les grèves, Le Douron
à dater
Plougastel Daoulas, L’Image
à dater
Outrage
- Carantec, l’Etoile
5 janvier
Gourin, Le Jeanne d’Arc
semaine du 26 janvier
Plougonvelin, Le Dauphin
1er février
Carhaix, Le Grand Bleu
5 février
Questembert, L’Iris
6 et 8 février
Moëlan sur Mer, Le Kerfany
8 février
Saint Malo, Le Vauban
9 février
Guéméné sur Scorff, Ciné Roch
10 février
Huelgoat, Arthus Ciné
16 et 19 février
Belle île, Le Rex
21 février
Quimperlé, La Bobine
24 février
Saint Brieuc, Le Club 6
avec Les Fondus déchaînés
24 février
Callac, Cinéma Argoat
06 mars
Etel, Cinéma La Rivière
à dater
Saint Renan, Le Bretagne
à dater
Douarnenez, Le Club
à dater
Groix, Cinéma des Familles
à dater
Loudéac, Le Quai des images
à dater
Morlaix, La Salamandre
à dater
Penmarc’h, L’Eckmühl
à dater
Plestin les grèves, Le Douron
à dater
Plougastel Daoulas, L’Image
à dater
Bigamie
- Nivillac, La Couronne
13 et 16 janvier
Le Faouet, Cinéma Ellé
31 janvier
Plougonvelin, Le Dauphin
1er mars
Gourin, Le Jeanne d’Arc
semaine du 2 mars
Carhaix, Le Grand Bleu
5 mars
Questembert, L’Iris
6 et 8 mars
Moëlan sur Mer, Le Kerfany
8 mars
Saint Malo, Le Vauban
9 mars
Guéméné sur Scorff, Ciné Roch
10 mars
Callac, L'Argoat
20 mars
Saint Brieuc, Le Club 6
avec Les Fondus déchaînés
22 mars
Quimperlé, La Bobine
24 mars
Etel, Cinéma La Rivière
à dater
Morlaix, La Salamandre
à dater
Penmarc’h, L’Eckmühl
à dater
Plestin les grèves, Le Douron
à dater
Plougastel Daoulas, L’Image
à dater
Loudéac, Le Quai des images
à dater
Huelgoat, Arthus Ciné
à dater
Groix, Cinéma des Familles
à dater
Douarnenez, Le Club
à dater
Belle île, Le Rex
à dater
Le Voyage de la peur
- Nivillac, La Couronne
3 et 6 mars
Le Faouet, Cinéma Ellé
7 mars
Callac, L'Argoat
13 mars
Gourin, Le Jeanne d’Arc
semaine du 30 mars
Carhaix, Le Grand Bleu
2 avril
Questembert, L’Iris
3 et 5 avril
Plougonvelin, Le Dauphin
5 avril
Saint Malo, Le Vauban
6 avril
Moëlan sur Mer, Le Kerfany
12 avril
Guéméné sur Scorff, Ciné Roch
14 avril
Saint Brieuc, Le Club 6
avec Les Fondus déchaînés
27 avril
Etel, Cinéma La Rivière
à dater
Saint Renan, Le Bretagne
à dater
Belle île, Le Rex
à dater
Carantec, l’Etoile
à dater
Douarnenez, Le Club
à dater
Huelgoat, Arthus Ciné
à dater
Groix, Cinéma des Familles
à dater
Loudéac, Le Quai des images
à dater
Morlaix, La Salamandre
à dater
Penmarc’h, L’Eckmühl
à dater
Plestin les grèves, Le Douron
à dater
Plougastel Daoulas, L’Image
à dater