Information du : 23/02/2018

Abracadabra

C'est avec grand plaisir que nous recevrons les 28 et 29 mars dans trois salles du réseau le cinéaste espagnol Pablo Berger qui nous avait régalé avec Biancaneves et qui accompagnera en avant-première sa nouvelle comédie, Abracadabra.

Carmen est mariée à Carlos,un conducteur de grue macho, fan de foot, qui ne lui prête plus guère attention. Après une séance d’hypnose dont il est le cobaye pendant un mariage, Carlos devient le parfait époux. Quelque chose à changé...

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Pablo Berger signe une comédie fantastique abracadabrantesque ! Un pur film de genre, comme on aime que l’Espagne nous en livre, mais aussi et surtout un improbable pamphlet à l’émancipation de la femme face à une société machiste. Les spectateurs qui ont vu Blancanieves apprécieront le grand écart artistique que le réalisateur est parvenu à effectuer, tout en gardant la même équipe technique. Après sa réappropriation des codes du cinéma muet et noir et blanc des années 1920, Pablo Berger s’essaie cette fois à une fiction parfaitement contemporaine, tant dans sa mise en scène que son écriture. Et pourtant, Berger reste fidèle à une thématique qui lui semble chère, à savoir la dénonciation de la violence qui prend source dans les relations conjugales. Pour cela, il imagine un couple qui ne fonctionne que grâce au déni dont la femme fait montre à l’égard de la nonchalance de son époux (...)

(...) Le comportement bourru de cet homme antipathique parvient cependant à être le moteur de scènes véritablement désopilantes dans les premières minutes du long-métrage. Le scénario parvient après cela à intégrer un retournement de situation de l’ordre du fantastique dans ce qui s’ouvrait pourtant comme une comédie de mœurs parfaitement terre-à-terre. Là où le mélange de genres est également une réussite, c’est dans la façon dont il parvient ensuite à se muer en véritable thriller psychologique, et donc en source de suspense qui sache véritablement prendre aux tripes. Le talent comique des acteurs masculins, additionné à la gravité que parvient à imposer le jeu de Maribel Verdu, parvient également à enrober ce drame social dans une trame rocambolesque et pleine d’humour. Autant dire qu’Abracadabra profite d’une écriture baroque et chargée en surprises. Mais cette affirmation pourrait tout aussi bien s’appliquer à l’aspect esthétique du film, qui n’hésite pas à faire appel à un univers visuel bariolé, allant même parfois jusqu’à convoquer ouvertement l’héritage artistique de Pedro Almodovar.

Le discours féministe, audacieux car présenté comme anticonformiste, qui naît de ce conte moderne est le fruit d’un cinéaste qui maitrise son art, et n’hésite d’ailleurs pas à multiplier les clins d’œil à ses références filmiques. Le cadrage singulier de certains plans ou bien encore le caractère délirant des personnages secondaires sont autant d’autres exemples qui confirment le soin que Pablo Berger a mis dans cette comédie pas comme les autres. Au-delà du seul film de genre foutraque mais astucieux, on aimerait en tout cas voir plus souvent un tel cinéma d’auteur qui assure la caution « divertissement ».

- à voir, à lire

ABRACADABRA

Un film de Pablo Berger
avec Maribel Verdú, Antonio de la Torre, José Mota
Espagne - 2017 - 1h36
Sortie le 4 avril

LES RENCONTRES

L'INVITE :
PABLO BERGER

Né à Bilbao en 1963, Pablo Berger vient du clip et de la publicité. Il fait ses débuts au cinéma en 1988 avec le court-métrage Mamá. Les prix remportés lui permettent d'obtenir une bourse en 1990, et de suivre un master de réalisation cinématographique à la Tisch School of Arts de New York. Il réalise son premier long métrage en 2003, Torremolinos 73, qui évoque l'atmosphère puritaine de la fin des années franquistes et remporte un grand succès dans de nombreux festivals internationaux. Son
deuxième film, Biancaneves, tourné en noir et blanc et muet, n'arrivera que huit ans plus tard. Un travail qui lui rapportera entre autres dix prix aux Goya en 2013, y compris celui du meilleur film.